Voici un article que notre rédacteur en chef, Jean Dufourcq, a publié sur le Huffington post (ici). JDOK.
La transition politique a commencé en Algérie. L’élan donné par une jeunesse résolue a pris de vitesse les tenants du système en place comme les analystes attentifs à ce pays si proche. La transition est désormais irréversible car l’essentiel des forces vives est dans la rue. Ce n’est plus l’effervescence habituelle des protestataires; car on y voit tous les Algériens, hommes et surtout femmes, les plus jeunes et les plus geek comme les plus anciens, les chibanis blasés. Et puis cela se passe partout, à Alger bien sûr, et dans toutes les autres villes symboliques mais aussi dans le bled. Partout les Algériens se mobilisent dans la rue le vendredi. Personne ne les en délogera. Et ils font savoir clairement que la transition se fera à leurs conditions.
Tous les affiliés du système ont pris leur distance avec le pouvoir présidentiel dominant depuis près de 20 ans. Et le président a dû céder la main. C’est qu’au fond, tout le monde se sentait humilié par la déchéance d’un président qui fut un personnage historique respecté et qui avait su imposer la concorde civile pour sortir de la cruelle décennie noire. C’est aussi que personne ne voulait d’un 5ème mandat qui soit un simple changement de clan; tout le monde était fatigué du système. Et puis les jeunes étaient branchés sur le nouveau monde, sur l’innovation, sur la modernité, sur l’aventure et la réussite et bien moins concernés par l’héritage du passé. Ils rêvaient d’autre chose et en parlaient sur les réseaux sociaux, entre jeunes du Maghreb, également frustrés par le blocage régional et l’avenir bouché.
Et puis tout autour, il y a le miroir du changement, l’expérience tunisienne inachevée, l’Italie et sa coalition décapante, la Grande-Bretagne et sa rupture européenne, la France et son Grand débat… Et dans la péninsule arabique, les jeux de rôle archaïques, les tensions multiples, les Palestiniens isolés, les Syriens divisés. Alors à l’annonce du 5ème mandat, le peuple algérien, a pris fièrement les devants, ce sera non. Et en un mois, le vieux système a été remisé.
On ne fera pas ici l’analyse des subtils jeux actuels entre les clans du pouvoir qui font parler d’eux chaque semaine pour sauver la mise avant l’échéance des 90 jours. Après la période coloniale, la France est bien placée pour connaître la fierté et la détermination du peuple algérien. Il n’est pas question d’interférer avec le destin d’un peuple avec lequel elle a une histoire si complexe à gérer, une population si diverse à partager. Alors, fidèle à ses idéaux républicains, elle voudra d’abord saluer la transition algérienne. C’est au peuple algérien rassemblé d’accomplir sa renaissance nationale à son rythme. Mais il n’est pas question non plus de lui laisser ignorer frileusement combien cette transition est appréciée en France même, comme d’ailleurs au Maghreb, car elle est porteuse d’espoir et de modernité pour tous. Et d’abord pour les 10% de Français qui ont des attaches en Algérie. Admiratif de la sérénité et de la détermination de la jeunesse, le peuple français veut tendre la main avec sympathie au peuple algérien et lui souhaiter bonne chance pour cette transition résolue vers le progrès.
Nous sommes après la fin du système mais avant l’Algérie de demain à la construction de laquelle les Français veulent apporter leur soutien amical et généreux. Dans la dynamique de la mondialisation actuelle, faisons enfin de notre espace commun de Méditerranée occidentale un vrai laboratoire de la mondialisation où 110 millions de Maghrébins et 180 millions de Latins sauront ensemble tirer parti de leur proximité historique, géographique et culturelle et constituer une véritable communauté de destin et d’intérêt profitable à tous.
Donc ce sera la fin de la demande de repentance? car il y a une rupture générationnelle. Il faudra chercher ailleurs les causes de l’échec du FLN.