Le professeur Mekkaoui est non seulement un ami de longue date de La Vigie : il est aussi un observateur attentif et sagace de la situation au Maghreb en général et tout particulièrement en Algérie. Merci à lui de ce point d’étape sur la situation en Algérie à la sortie de l’été. JDOK
Après sept mois de protestations pacifiques ayant touché les 48 wilayas de l’Algérie, le Commandement de l’ANP, l’Armée Nationale Populaire, et particulièrement ses services de renseignement regroupés sous la houlette du Général major Chef d’État Major (CEMA) Ahmed Gaïd Salah, n’ont pas réussi à apaiser la colère du peuple algérien. Les revendications de cette révolution du sourire sont simples : un État civil et non militaire, un État de droit et la fin de la tutelle des militaires sur les Algériens et leur retour aux casernes tel qu’il est stipulé dans l’article 28 de la Constitution.
Le Commandement de l’ANP, depuis le coup d’État du 12 avril 2019, a procédé à une structuration en profondeur des services de renseignement estimant que les 2 millions et demi d’agents de l’ex-patron du DRS étaient derrière ce soulèvement populaire. Cette mauvaise évaluation de la situation a poussé les militaires à sacrifier une partie pourrie du système et protégée par l’ancien « deux ex machina » de l’Algérie. Cette réorganisation a démontré ses limites et surtout qu’il existe d’autres facteurs qui influent directement sur la population. Après l’échec de cet « assainissement » du système qui visait la satisfaction du peuple, les militaires incarnant les pouvoir réel avait tenté de jouer d’autres cartes dangereuses qui allaient faire exploser l’Algérie tout entière.
Parmi les éléments de cette stratégie nous remarquons la tentation de diviser les Algériens entre Zouaves d’un côté et novembristes/badistes de l’autre ; entre Kabyles et Arabes ; entre l’Est et l’Ouest ; entre salafistes proches de l’Arabie Saoudite et ceux proches des E.A.U). Tous les scénarios fabriqués par les services du Général Mohamed Kaïdi ont avorté compte-tenu de la détermination du peuple algérien qui a continué à manifester pendant la chaleur du mois de ramadan, les fêtes religieuses, les vacances d’été …Rien ne l’a arrêté pour la réalisation de ses rêves qui demeurent toujours impossibles.
Devant ce phénomène la société algérienne dans sa grande majorité veut en finir avec le pouvoir réel quelles que soient les conséquences de cette position radicale. Plusieurs font appel à la désobéissance civile ou la grève générale, bloquant les secteurs stratégiques du pays : ports, aéroports, gazoducs, gisements du gaz et pétrole, etc. En face de cette radicalité le Commandement de l’ANP s’est réparti en deux clans : le clan des généraux colombes et des celui des généraux faucons. Le premier groupe de généraux semble le plus fourni ; les 22 proposent une issue honorable en négociant avec les partis politiques crédibles pour sauvegarder le système et leurs intérêts. Le deuxième groupe de quatre radicaux principaux est mené par les Généraux Bouazza Ouassini, directeur du DGSI et son adjoint le Général Othmane Miloud alias Kamel le caniche, le politologue du groupe, et pousse le CEMA vers l’organisation des élections présidentielles avant la fin de l’année 2019. Sur ce chemin, l’utilisation de la violence serait inévitable pour ne pas dire qu’elle a déjà commencé. Dernièrement en effet la tension entre l’armée et le peuple s’est manifestée par plusieurs actions : la tentative d’assassinat ou de kidnapping de quelques symboles du Hirak (comme Karim Tabbou), l’incarcération de plusieurs étudiants, la fermeture de l’accès aux grandes villes dont la capitale, l’utilisation de la guerre électronique à outrance et la mobilisation de plusieurs médias publics et privés, menaces, chantages…etc.
L’Algérie se trouve sur un baril de poudre qui nous rappelle les tragiques événements de la décennie noire. Le Commandement de l’Armée qui dirige le pays depuis 1962 n’hésitera pas à proclamer l’état d’urgence ou la loi martiale afin d’atteindre ses propres objectifs et de permettre le recyclage de l’ancien système avec le soutien de plusieurs puissances étrangères connues par leur implication directe dans le soulèvement. De plus l’annonce d’élections présidentielles avant la fin de l’année 2019 va avoir des conséquences imprévisibles. Elles permettront au mieux de stabiliser superficiellement et momentanément l’Algérie. Le peuple rejette en bloc ce scrutin qui ne mettra pas fin à la crise politique profonde et qui l’oppose au détenteur du pouvoir, l’armée. Ce bras de fer ne résoudrait pas cette situation complexe et nous rappellera le syndrome syrien. La crise sociale et la paralysie économique de l’Algérie sont des éléments qui favorisent une intervention militaire.
En conclusion provisoire, l’utilisation de la force serait cette fois-ci très risquée pour les raisons suivantes :
- L’ANP n’est ni homogène ni solidaire du Commandement ;
- Les pressions occidentales sont fortes du fait d’un possible phénomène réflexe d’immigration car le scénario syrien n’est pas exclu ;
- L’implosion territoriale de l’Algérie en plusieurs peuples et régions n’est alors pas à exclure.
Tous les observateurs croient savoir que l’Algérie se dirigerait alors vers une situation de chaos sauf si une révolution de sérail à la portugaise ou l’espagnole changeait la donne.
Abderahman Mekkaoui.
Cette « étude » de la situation en Algérie est à jeter aux oubliettes pour ne pas dire autre chose. L’Algérie est une et indivisible. Concernant l’armée algérienne, elle est issue de ce peuple farouche qui a botté le derrière à la France coloniale et aux forces de l’OTAN(voir discours de J.F.Kennedy devant le Congrès en 1957).
Il suffit de voir l’émouvant élan de solidarité envers le regretté Général Gaid Salah lors de son enterrement ce jour 25/12/2019. Dont acte !
Bien dit frère. Foutez-nous la paix, le peuple algérien est assez aguerri pour reconnaître ses amis. Tournez-vous un peu sur ce qui se passe chez vous.!!!