Malgré la chute significative de Vouhledar, le dispositif ukrainien ne s’écroule pas même si la situation des FAU reste inquiétante. Le voyage de Zelensky en Amérique a été un échec.
Source : Poulet volant ici
Déroulé des opérations militaires
Front sud : Rien à signaler.
Front de Donetsk : Vouhledar a été prise par les Russes, sans surprise. Elle avait fait l’objet de nombreux assauts russes, dès octobre 2022 puis février 2023, novembre 2023 et encore au printemps 2024. Ces assauts directs ont tous échoué. La ville a été prise une fois que ses routes d’approvisionnement ont été coupées, notamment la route 524 qui la reliait à Kostiantynivka. Désormais, toute la crête à l’ouest (entre Vouhledar et Prechytivska) est aux mains des Russes qui poussent vers le nord, tout comme ils progressent depuis l’est, en avant de Vodiane et Kostiantynivka. Les localités de Bohoiavlienka et Novoukrainka devraient être prochainement abordées.
Au centre, depuis Marinka, les Russes ont pris Heorhivka et poussent contre Masymilianivka, dernière défense orientale de Kourakhove, au sud du grand réservoir de la Vovcha. Juste au nord de la petite rivière Osykova, ils ont pris Hostre et abordent Ostrivske, premier hameau de Kourakhove.
Le saillant entre Osykova et Vodiana se réduit continûment, les Ukrainiens n’ayant plus que quelques unités à Zhelanne Druhe à l’est de la Vovcha. Les Russes ne poussent pas encore contre Hirnyk mais à l’ouest d’Ukrainsk : Tsukuryne aurait ainsi été prise, tout comme la voie de chemin de fer qui monte vers le nord entre deux remblais. De là, les Russes ont plusieurs possibilités : pousser plein Ouest pour coiffer Khourakove au sud ou déborder Selydove au nord.
Au nord de Selydove, petite poussée au nord-ouest de Novohrodivka, jusqu’à Sukhy Yar. Kruti Yar, Krasny Yar et Mylkolaivka sont également passés sous contrôle russe. Les avant-postes russes sont à moins de 6 km de Pokrovsk.
Dans le secteur de Toretsk : Progression dans le centre de la ville qui semble coupée en deux.
Front de Bakhmout : Pas grand choses à signaler. Au nord-ouest de Soledar, Les Russes ont annoncé des combats à Verkhnokamyanske. non confirmés par des images. Si cela était le cas, cela aurait de grandes conséquences sur le saillant de Siversk.
Front de Svatove/Koupiansk. Au sud, les Russes ont franchi la Zherebets et avancent à l’ouest de Makivka. Plus au nord, vers Pischane, les Russes ont poursuivi leur grignotage et sont désormais à moins de 2 km de la rivière Oskil, menaçant Krouhlyakivka. La route de liaison nord-sud est désormais impraticable pour les Ukrainiens dont le dispositif, à l’est de l’Oskil, est désormais coupé en deux.
Front de Kharkiv : RAS
Front de Soudja : Stabilité. Les Ukrainiens s’étaient brièvement engagés dans Veseloye mais en ont été délogés. Dans le reste du saillant, les Russes ont pris quelques km² au sud de Borki, le reste du dispositif inchangé ;
Analyse militaire
La stabilité dans la poche de Soudja montre que la situation actuelle satisfait les deux parties, même si elles ont toutes deux renforcé leur dispositif (on parle désormais de 50.000 h de part et d’autre). Pour les Ukrainiens, conserver une portion de territoire russe constitue un gage utile alors que la question des négociations est sur toutes les lèvres. Pour les Russes, cela permet de fixer à peu de frais une partie importante des forces ukrainiennes et de poursuivre l’effort ailleurs.
Dans le Donbass, les Russes ont conquis 103 km² il y a deux semaines puis 70 km² cette semaine. La baisse de cette semaine (passage de 15 à 10 km² quotidien) ne doit pas cacher l’importance des gains effectués par les Russes au cours de la quinzaine. Nous revenons à un débat déjà suggéré il y a quelques semaines : tous les km² s’équivalent-ils ?
Le stratégiste considère que non. Ainsi, la prise de Vouhledar constitue un tournant qui devrait avoir au moins autant d’effets que la prise d’Advivka ou celle d’Ocheretyne. Cela permettra tout d’abord aux Russes de reprendre le contrôle de tout le sud du Donbass avec, d’ici la fin de l’année, la prise de contrôle de Kourakhove : elle est la dernière place-forte ukrainienne à l’ouest de Donetsk. Sa prise forcerait les Ukrainiens à se rétablir sur une ligne Pokrovsk – Andrivka – Grand Novosilka. Cette dernière localité devrait par ailleurs être la cible prochaine des efforts russes. Toute cette manœuvre vise à prendre le contrôle de la partie sud de l’oblast de Donetsk. Ils visent des objectifs politiques derrière cette manœuvre opérative.
Simultanément le grignotage lent de Toretsk cherche à ouvrir un front au sud de Kostantinivka. Enfin au nord, Siversk demeure un objectif mais l’effort russe porte désormais sur la rive orientale de l’Oskil.
Répétons-le : ce n’est pas brillant au sens d’un jeu vidéo qui met en scène de grandes manœuvres. C’est lent, tenace, obstiné, obscur, médiocre. Mais à la longue, c’est efficace.
Vu du côté ukrainien, la situation est évidemment désagréable. On est loin de l’euphorie de 2022 où les mots de victoire avaient un tout autre sens. Malgré tout, l’Ukraine considère qu’elle peut abandonner régulièrement quelques km² dans le Donbass. Il lui importe de tenir, de passer l’hiver, d’attendre une hypothétique offensive de 2025 ou la constitution des nouveaux bataillons armés par la mobilisation. Tout l’enjeu consiste à limiter les pertes de forces de façon que les renforcements en cours de constitution ne soient pas consommés avant même d’être engagés. Kiev mène ainsi, malgré ce qu’en disent les sources russes, une manœuvre rétrograde assez efficace même si sur le terrain, le front donne l’impression de craquer. Or s’il y a de micro-ruptures qui peuvent susciter des revers sensibles (une relève mal opérée à Ocheretyne, par exemple), globalement le dispositif tient, malgré un RAPFEU évidemment très défavorable.
Une pointe d’inquiétude demeure cependant : on ne voit pas l’organisation de nouvelles lignes d’arrêt à l’ouest des dispositifs actuels (Pokrovsk ou Kourakhove). La prudence militaire l’exige : ne pas les mettre en place dès à présent paraît une faute.
Analyse politique
Disons les choses simplement : la visite américaine de V Zelensky a été un échec. Il a reçu comme à l’habitude son lot de bonnes paroles mais aucune décision tangible de soutien, malgré le communiqué habilement distribué par la Maison blanche pour faire croire le contraire. Pas d’armes ni d’argent.
La raison en est double. D’une part, l’affaire des armes à longue portée a pris une dimension nucléaire qu’il ne faut pas négliger. En effet, la Russie a confirmé avoir modifié sa doctrine d’emploi des forces nucléaires. Le soutien indirect d’attaques directes contre le sol russe constitue désormais une cause d’engagement. De même, la Russie a étendu son parapluie nucléaire à la Biélorussie. C’est à la fois peu et beaucoup. On peut en effet considérer que ce changement de doctrine est minime. Effectivement, il a été soigneusement calculé pour ne pas paraître comme un coup de communication, du « sabre rattling » comme disent les Anglais. En même temps, il a été suffisamment précis pour que le message soit reçu cinq sur cinq par ceux à qui il est destiné : les experts de stratégie nucléaire et au-dessus d’eux, les décideurs politiques des puissances nucléaires.
Lors de l’offensive de Soudja, beaucoup se sont félicités de la « remarquable initiative ukrainienne », démontrant « une fois encore que les lignes rouges de la Russie n’en étaient pas ». Je crois au contraire que cette affaire n’a pas plu au Kremlin et que l’amendement à la doctrine nucléaire, (préparé cependant depuis de longs mois) a été la réponse faite à la remarquable initiative. Autrement dit, Kiev espérait que cette provocation entraînerait plus encore le soutien occidental. Il est à craindre que ce soit l’inverse qui se soit manifesté.
D’autre part, l’attentisme règne : chacun agit désormais en fonction du résultat des élections américaines. Les équilibres de pouvoir qui se mettront en place à Washington à partir de novembre décideront évidemment de la tournure des événements. Et si rien ne se passera avant janvier (le temps que la nouvelle administration se mette en place), les opérations se poursuivent sur le terrain : les Russes ont ainsi deux à trois mois d’opération devant eux avant que l’on parle sérieusement de négociations. Les deux à trois semaines qui viennent présagent d’une météo clémente. Rappelons enfin qu’ils ont débuté leur offensive l’an dernier au 4 octobre et que les saisons automnale ou hivernale ne les ont pas empêchés de pousser. L’artillerie au loin ou l’infanterie au près surmontent les débâcles de la raspoutitsa.
Précisons enfin qu’il faut parler des élections au pluriel. Chacun se concentre sur la personne de l’élu (Trump ou Harris) mais il ne faut pas ignorer les élections législatives, au Sénat ou à la Chambre. Rien ne dit que le futur Congrès laisse le nouveau président faire tout ce dont il a envie.
Aussi ne peut-on désormais envisager de négociations (de cessez-le-feu plus que de paix) avant 2025.
OK
Franchement, on ne voit pas ce qui pourrait permettre d’envisager des négociations « de cessez-le-feu », surtout après le remarquable (cohérent, factuel et consensuel, de mon point de vue) exposé qui précède et qui démontre une irréversible et inarrêtable avancée russe.
Les Russes avancent sur tout le front, et se mettent en position de tout balayer une fois que les verrous (Prokrovsk, Siversk, Koupiansk) auront sauté.
Il n’y aura pas de « cessez-le-feu » mais soumission complète aux exigences russes (reconnaissance des territoires perdus, reconnaissance de la non-appartenance à l’OTAN) ou poursuite de la destruction de l’Ukraine, ce qui pourra aller jusqu’à la destruction complète de l’armée ukrainienne, armée ou non et l’éviction du pouvoir ukrainien actuel, qui est, il faut le rappeler désormais une dictature illégitime qui a renoncé à toute démocratie et qu’il est honteux et absurde de soutenir.
Le coup d’État qui rejettera Zelensky quoi qu’en dira Macron et ses amis est maintenant à envisager et se trouve en préparation côté russe, il consacrera une quasi-annexion de l’Ukraine quel que soit son orientation car la Russie n’acceptera jamais un voisin terroriste.
Pour l’éviter il faut arrêter les frais, et mettre tout en oeuvre dés maintenant pour tenter de remplacer Zelensky, afin de conserver Odessa à une Ukraine neutralisée qui pourrait rester indépendante et économiquement viable.