Si les Ukrainiens tiennent dans le Donbass, ils cèdent beaucoup dans la poche de Soudja. Surtout, les Occidentaux ne les appuient plus vraiment, par-delà les mots. La situation est très compliquée.
Source des acrtes : Poulet volant
Déroulé des opérations militaires
Front sud : Légère reprise d’activité. Le 6 octobre, les Russes ont profité d’une négligence ukrainienne pour s’infiltrer, le long du Dniepr, dans les faubourgs ouest de Kamianske, juste au sud de Zaporijia. Après quelques jours et compte-tenu de la faiblesse de la ligne logistique, les Ukrainiens ont facilement repoussé les Russes à leur position initiale
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Au centre, petit ajustement dans la zone d’Orikhiv/Robotine https://x.com/Pouletvolant3/status/1844040335640637679/photo/4
A l’est, les Russes ont poursuivi leur grignotage de part et d’autre de Grand Novosilka. A l’est Zolota Niva a été prise ; à l’ouest, petites progressions vers Rivnopil. https://x.com/Pouletvolant3/status/1847578212357771745/photo/4
Front de Donetsk : Au nord de Vouhledar, légère progression vers Bohoiavlienka : les Russes veulent probablement prendre pied sur la cote 200 un peu à l’ouest, point dominant de la zone qui permet de menacer le nord (Novoukrainka) et l’ouest (Grand Novoslika). https://x.com/Pouletvolant3/status/1847578212357771745/photo/3
Au centre (secteur de Marinka), le gros de Masymilianivka a été pris et les Russes sont aux portes de Kourakhove. https://x.com/Pouletvolant3/status/1847578212357771745/photo/2
Le saillant entre Osykova et Vodiana est réduit. Les Russes poussent légèrement à l’ouest d’Hirnyk. Plus au nord, ils ont passé Tsukuryne. https://x.com/Pouletvolant3/status/1847913656316530888/photo/4
Selidove est de plus en plus cernée au nord et au sud, de premiers combats s’y dérouleraient. https://x.com/Pouletvolant3/status/1847578212357771745/photo/1
Dans le secteur de Toretsk : Les Ukrainiens se sont retirés de Nelpivka, à l’ouest. Stabilité dans le centre de la ville. https://x.com/Pouletvolant3/status/1847578206448112073/photo/4
Front de Bakhmout : Il y avait beaucoup d’incertitudes qui ont été levées. Du sud au nord de Chasiv Yar : Klishkivka quasi aux mains des Russes ainsi que tout le massif à l’ouest jusqu’au canal. Il aurait peut-être été franchi à cet endroit. Un peu plus loin, le canal a été franchi sur l’axe Ivanivske-Kostantinivka. Encore un peu plus au nord, il a également été franchi dans le faubourg Kanal de Chasiv Yar. Ultime point de franchissement à hauteur de Kalynivka. Ainsi, le canal Donbass Donets a été franchi à au moins trois endroits, deux autres suspectés aux deux extrémités nord et sud. Cela signifie que Chasiv Yar va être attaqué sur trois fronts et que le canal ne peut plus servir de ligne d’arrêt. https://x.com/Pouletvolant3/status/1847913656316530888/photo/2
Secteur Siversk : léger grignotage russe vers Bilohorivka https://x.com/Pouletvolant3/status/1846838349677359341/photo/2
Front de Svatove/Koupiansk. Secteur de Makivka : le saillant de Nevske n’est toujours pas complètement réduit par les Russes. Secteur de Pischane : au sud, les Russes ont pris Stelmakhivka. Au nord, combats aux abords de Kruliakivka qui reste aux mains des Ukrainiens même si les Russes ont atteint la rivière Oskil. https://x.com/Pouletvolant3/status/1847913656316530888/photo/1
Front de Kharkiv : RAS
Front de Soudja : Les Ukrainiens ont beaucoup perdu au cours de la quinzaine. Ils ont dû céder tout leur dispositif au nord-ouest qui assiégeait Korenovo et ont dû reculer jusque Zeleny Shiyak. De même, les franges nord et nord-est sont grignotées. Enfin au sud-est, la zone entre Borki et Plekhovo est contestée. https://x.com/Pouletvolant3/status/1847578206448112073/photo/1
Analyse militaire
Ainsi, cette quinzaine a vu un effort russe dans la poche de Soudja, le reste du front étant globalement stable. Macette note (ici) un fléchissement du RapoFeu qui serait passé de 9/1 à 6/1 : cela serait le résultat des frappes sur les dépôts de munitions russes des deux derniers mois. A noter que ces frappes ne se renouvellent pas depuis une quinzaine de jours.
Dans le Donbass, les Russes ont pris aux Ukrainiens 44 km² il y a deux semaines, 74 km² cette semaine. Sur le front de Soudja, ils ont repris 55 km² il y a deux semaines (ici), 93 km² cette semaine. Les Ukrainiens n’y contrôlent plus que 631 km² https://x.com/Pouletvolant3/status/1847934517748576311/photo/2
Dans le secteur du Donbass, les grignotages russes s’estompent légèrement à 10 km²/j. Cette (relative) baisse de régime peut être due à plusieurs causes : sorte de pause opérationnelle (de tels ralentissements d’une ou deux semaines ont déjà été observés), affaiblissement du RapFeu, début de conditions météorologiques plus difficiles. Ainsi, la situation est relativement stable sur le front sud, à Toretsk ou vers Siversk (sans même parler du front de Kharkiv quasiment atone). Il y a un effort lent autour de Selidove ou de Kourakhove. Les deux éléments les plus importants de la quinzaine restent l’atteinte de l’Oskil au sud de Koupiansk et le franchissement du canal à Chasiv Yar. Mais nous restons là dans le domaine tactique.
Ce qui s’est passé à Soudja est plus significatif : les Russes ont en effet poursuivi leur offensive, débutée il y a près de trois semaines, arrivant à réduire tout le dispositif nord-ouest des Ukrainiens (cette semaine, progression de 15 km²/j dans ce seul secteur). La perte de terrain est notable et manifeste un effort russe (qui explique peut-être la relative stabilisation dans le Donbass, l’effort opératif étant porté vers le front dit de Koursk). Cela signifie que les Russes ont décidé de reprendre le terrain pris par les Ukrainiens. Cela ne surprend personne de sensé, tant cette prise de gage paraissait précaire. Les Ukrainiens devraient s’efforcer de constituer un môle défensif autour de Soudja en espérant tenir le plus longtemps possible. Les Russes devraient continuer à pousser pour que ce territoire russe n’entre pas en considération dans les éventuelles négociations qui se préparent, à supposer qu’elles se préparent. Il n’y a là rien de surprenant pour l’observateur : nous avons exprimé depuis longtemps cette logique des choses.
La situation ukrainienne paraît de plus en plus compliquée. Certes, le front tient globalement puisque l’on a même observé des petites contre-attaques très localisées, signe que les FAU ne se laissent pas faire. De même, les m² de territoire sont défendus ardemment comme le prouve la très lente progression à Chasiv Yar, agressée depuis des mois ou encore la résistance de Selidove, devenu un point de fixation depuis des semaines.
Mais dans la guerre d’attrition qu’ils mènent, les choses s’aggravent dans la durée. On ne peut pas parler d’effondrement, mot que j’ai soigneusement évité depuis que j’écris ces points de situation. Mais la tendance reste très préoccupante avec des ressources en hommes, en matériels ou en munitions qui s’amenuisent tendanciellement. Ainsi, la résistance se paye au prix fort (des pertes) sachant que les informations sur la mobilisation de nouvelles troupes ne sont pas rassurantes du tout. Or, le maintien de la pression offensive russe empêche l’armée ukrainienne de reprendre son souffle, de se remettre en condition et de se réorganiser. L’offensive russe a débuté il y a exactement un an : on ne la voit pas s’arrêter même si on peut s’interroger sur le maintien d’un tel niveau. Les Ukrainiens peuvent au mieux espérer une légère décroissance de l’effort adverse.
Ainsi, les Ukrainiens résistent en perdant peu à peu leur vitalité, dans un lent épuisement tout à fait inquiétant. Personne ne discerne un quelconque rebond.
Analyse politique
Le plan de victoire imaginé par V Zelensky n’a pas convaincu : il supposait en effet l’adhésion à l’Otan et la fourniture d’armes de longue portée : au fond, sans le dire aussi nettement, une escalade avec implication directe des Occidentaux dans le conflit. La réponse a été un non à peine poli.
Le sommet de Ramstein s’est en effet transformé en une petite réunion quadripartite à Berlin le 18 octobre, à l’occasion de la venue éclair de J. Biden. Avec O. Scholtz, E. Macron et K. Stammer, le quatuor s’est engagé à « continuer de soutenir l’Ukraine dans ses efforts pour garantir une paix juste et durable, fondée sur le droit international, y compris la Charte des Nations unies, ainsi que sur le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale ». En termes non diplomatiques, cela signifie un abandon de l’Ukraine. On ne parle plus de victoire (mot qui était dans la formule de Zelensky), juste de « paix » : autrement dit, de négociation. Et dans l’état actuel des choses, cette négociation se fera au détriment de celui qui est en plus mauvaise position. Les références au droit international, à la Charte ou à l’intégrité territoriale ne sont là que de pure forme. L’Occident ne peut ou ne veut plus soutenir l’Ukraine.
Certes, il maintiendra les apparences, comme ce qu’a récemment proposé la France avec la promesse de Mirage 2000 ou la formation d’une brigade ukrainienne équipée de matériel. Ce ne sont que des antalgiques, non des médicaments de guérison.
Désormais, les regards sont tournés vers les États-Unis et les élections du 5 novembre (cf. LV 251). Mais le nouveau président ne s’installera que début janvier, rien n’aura lieu publiquement avant février. Il reste donc quatre mois avant une première fenêtre. Elle suppose que Poutine est prêt à négocier : rien ne le dit. Tout indique au contraire qu’il veut poursuivre son effort : quels sont désormais ses objectifs ? réduire la poche de Soudja ? reprendre le Donbass ? voir les FAU s’écrouler ? Obtenir la neutralité de l’Ukraine ? Plus ? Nul ne le sait vraiment.
OK
La situation, honnêtement exposée va jusqu’à parler d' »antalgique » pour l’effectivement ridicule livraison par la France de mirages et d’une « brigade » équipée à une dictature semi mafieuse en lutte contre une puissance atomique avec qui on devrait traiter. Quand on pense qu’on veut « en même temps » cesser d’armer Israël qui se bat contre nos ennemis naturels, on a la tête qui tourne.
En réalité, l’affaissement, lent et visqueux, va jusqu’à laisser à l’ennemi le soin de décider de la suite (c’est la conclusion de l’article).
Pourquoi ne pas prendre les devants? Cesser de soutenir le mendiant mafieux (Zelensky) et négocier à partir ce que la Russie a toujours clairement dit qu’elle exigeait: la neutralité de l’Ukraine et la reconnaissance de ce qu’elle a conquis (la Crimée et les 4 régions). Un objectif simple: éviter à tout prix la perte d’Odessa qui ruinerait pour toujours l’Ukraine. Est-il encore temps ?
La neutralité de l’Ukraine est bien évidemment la seule issue acceptable par les deux camps, ou plutôt la non intégration dans l’OTAN – après que Kiev soit dans l’UE, les Russes s’en foutent bien au contraire, la reconstruction sera pour nos contribuables et la Russie aura un nouveau client UE sur le Don ; idem que l’Ukraine s’arme auprès de nous, l’essentiel est qu’aucune troupe ni base de l’OTAN soit également sur le Don. Une zone « franche » est d’ailleurs dans l’intérêt de l’OTAN. Mais il va falloir négocier la contrepartie à Kaliningrad, la présence nucléaire russe y étant autrement problématique pour nous. Et mettre le doigt dans l’engrenage d’une extension de cette zone franche aux Etats baltes et à la Biélorussie, et à la Finlande. Autrement dit négocier une nouvelle sécurité en Europe, ce que les Russes demandent à défaut de tout accepter, mais manger notre chapeau et oublier toutes les conneries que certains ont pu dire et écrire depuis février 2022. C’est ça qui va bloquer, de notre côté : le ridicule des princes et de leurs conseillers.