Négociation russo-américaine (LV 184)

Des observateurs européens se sont beaucoup alarmés du risque de guerre aux confins de l’Ukraine. Et si tout cela n’était que du bluff, V. Poutine jouant cette fois au poker et encaissant des gains dans la négociation bilatérale avec les États-Unis ? Tuant du même coup toute velléité d’une défense européenne autonome.

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OSS 117, rentre à la maison ! (Le Cadet n° 87)

Une maladie de vaincus : on connait cette réponse de Foch aux négociateurs allemands qui se lamentaient à Rethondes de capituler non parce que leur armée était défaite, mais parce que les rues outre-Rhin se couvraient de barricades. Comment ne pas faire le rapprochement avec des médias africains remontés, nos convois attaqués, notre drapeau piétiné et brûlé et une junte malienne félicitant outrageusement les mercenaires russes de Wagner de premiers succès après tant d’années d’échecs français ? L’Afrique ne nous reproche pas tant de perpétrer le système colonial que d’être incapables de gagner la guerre contre le djihad. En un mot, de ne plus servir à rien. France go home ! Toute proportion gardée, la désillusion des Africains est la même qu’au soir du 17 juin 1940.

L’opération était globale, s’excuse-t-on à Paris, et ce sont ses aspects politiques et économiques locaux qui n’ont pas été implémentés (comme on dit dans les cabinets de consultants américains qui nous gouvernent). Mais c’est précisément parce que le plan était global qu’il a échoué ; non qu’une victoire militaire soit le sésame de la géopolitique, mais sans elle il n’y a rien de pérenne. Et il ne peut plus en être autrement : il est loin le temps de Serval, quand nos unités aéroblindées étaient fêtées en libératrices, nous sommes désormais incapables de rééditer l’exploit, et avant longtemps [1]. On a ainsi appris en fin d’année, la même semaine, que si la Corée du Sud et Israël ont budgété des hélicoptères lourds, ceux qui nous manquent dans le Sahel et que Barkhane a dû se faire prêter, les actuaires de Bercy ont opposé une fin de non-recevoir à nos Armées, qu’il s’agisse d’achats américains ou d’un appareil européen à concevoir. Faut pas jouer les riches quand on n’a pas le sou, chantait Brel. Quoique, quand il s’agit de nettoyer les bas de bilan des banques d’affaires ou de subventionner des start-up éphémères, les sous, on les trouve rapidement. La dépense oui, la défense jamais !

Et tandis qu’Américains et Russes se découpent une nouvelle fois le continent, les Français et cette fois les Britanniques étant aussi absents qu’à Yalta, l’Union Européenne annonce une réflexion, envisage de débattre, prévoit de se doter d’une boussole stratégique dans un futur hypothétique à anticiper à l’horizon d’une décennie. Mais les institutions censées la représenter sont aux abonnés absents. Si Kissinger se plaignait que l’Europe n’ait pas de numéro de téléphone, le progrès est qu’il sonne désormais dans le vide – à supposer que l’Amérique appelle. Quand on est incapable de formuler l’ombre du soupçon d’un semblant de volonté pour son voisinage, on ne prétend pas régenter des horizons lointains. Le temps de Faidherbe et Laperrine est clôt. Celui d’OSS 117 également.

[1] Voir Le Cadet : n° 67, « Sahelistan, poil aux dents », janvier 2020 ; n° 77, « Le Cyber des Tartares », décembre 2020 ; n° 82, « Sur la pointe des pieds », juin 2021.

Le Cadet

Source

La Vigie n° 183 : De 2021 à 2022, encore l’incertitude ! | Mésentente cordiale | Lorgnette : Nobels sud-africains

Lettre de La Vigie du 5 janvier 2022

De 2021 à 2022 : Encore l’incertitude !

L’année 2022 s’annonce encore très incertaine : une Amérique banale, une Russie déclassée, une Chine crispée, un Moyen-Orient hésitant, une Afrique en panne et une Europe indécise ne favorisent pas de grands bouleversements stratégiques. La rivalité sino-américaine demeure le principal facteur structurant. Quant à la France, il faudra passer l’élection présidentielle pour y voir clair.

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Mésentente cordiale

Avec 2021 s’est achevée l’année voulue comme celle du renouveau du leadership du Royaume-Uni sur les affaires du monde. Tandis que le 1er janvier 2022 marquait le premier anniversaire de l’entrée en vigueur effective du Brexit, que retenir de ces douze mois ? Qu’en déduire pour l’avenir de la relation franco-britannique et la normalisation de la relation entre l’UE et le Royaume-Uni ?

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Lorgnette : Nobels sud-africains

Deux prix Nobel sud-africains viennent de décéder à un mois d’intervalle.

Frederik de Klerk, dernier président blanc de l’Afrique du Sud, avait mis fin à l’apartheid et organisé une transition pacifique vers un régime démocratique qui avait permis aux Noirs d’accéder au pouvoir. Il avait obtenu le prix Nobel de la paix en 1993 avec Nelson Mandela. C’est lui qui change la doctrine du Parti National à partir de 1989, légalise les partis noirs et libère Mandela en 1990. L’abolition officielle de l‘apartheid a lieu en 1991. Il meurt le 11 novembre 2021.

Desmond Tutu est un évêque anglican noir qui, venu d’un milieu modeste, prêche la réconciliation entre les peuples. Son combat pour la non-violence lui fait obtenir en 1983 le prix Nobel de la paix. Il préside la Commission de vérité et réconciliation qui permet de faire la lumière sur bien des crimes et qui évite l’affrontement que tous prévoyaient à l’issue du changement de régime. Il n’hésita pas à dénoncer les dérives des successeurs de Mandela, notamment J. Zuma. Il est mort le 26 décembre 2021.

Deux hommes de bien qui vont manquer à l’Afrique du Sud qui connaît aujourd’hui bien des tourments. Puissent leurs successeurs être à la hauteur.

JOCV

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De 2021 à 2022,encore l’incertitude ! (LV 183)

L’année 2022 s’annonce encore très incertaine : une Amérique banale, une Russie déclassée, une Chine crispée, un Moyen-Orient hésitant, une Afrique en panne et une Europe indécise ne favorisent pas de grands bouleversements stratégiques. La rivalité sino-américaine demeure le principal facteur structurant. Quant à la France, il faudra passer l’élection présidentielle pour y voir clair.

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Mésentente cordiale (LV 183)

Avec 2021, s’est achevée l’année voulue comme celle du renouveau du leadership du Royaume-Uni sur les affaires du monde. Tandis que le 1er janvier 2022 marquait le premier anniversaire de l’entrée en vigueur effective du Brexit que retenir de ces douze mois ? Qu’en déduire pour l’avenir de la relation franco-britannique et la normalisation de la relation entre l’UE et le Royaume-Uni ?

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La diplomatie d’hier à demain, R. Delcorde

La diplomatie au service d’un monde en mouvement

Pour beaucoup, c’est une année inquiétante qui s’ouvre en 2022 sur fond de bruits de bottes, d’Ukraine en Taïwan pour les uns, du Yémen au Sahara occidental en passant par la Méditerranée orientale et le Sahel pour d’autres, partout où des points chauds se cristallisent. Le recours à la guerre est redouté, celui à la diplomatie ignoré.

Ainsi les alarmistes professionnels qui veulent resserrer les rangs des coalitions militaires d’hier se préparent à en découdre militairement avec des autocrates ciblés. Pour certains, la situation rappelle celle des années 1930 avec la montée des fascismes. Ce faisant, ces inquiets se posent plus en défenseurs du monde d’hier qu’en bâtisseurs d’une régulation des forces en présence dans le monde nouveau d’un XXIe siècle qui émerge, après la Guerre froide qui l’a fragmenté et avec la panne mondiale de la pandémie de Sras-Cov2 qui l’a fragilisé. De fait ces autocrates assumés et dénoncés à longueur de colonnes -Poutine, Xi Jinping, Erdogan- ces nouveaux tigres du XXIe siècle, récusent le caractère universel de l’ordre occidental établi en 1945. Ils veulent partager la gouvernance de la planète et la raccorder à leur histoire régionale, à leurs intérêts, à leur culture politique, à leurs valeurs.

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LV n°182 : La France et le plein exercice stratégique : AMR 2022 | Nouvelle-Calédonie : et maintenant ? | Lorgnette : Coexistence durable !

Lettre de La Vigie du 22 décembre 2021

La France et le plein exercice stratégique : AMR 2022

Pour clore cette année et nourrir le débat stratégique de la présidentielle, voici présentées les quatre logiques qui structurent la posture stratégique de la France fin 2021 : les voisinages, les compétitions, les frictions et les guerres froides. Dans le monde post Covid qui s’entrouvre faut-il garder ce logiciel dépassé du XXe siècle? Peut-on en explorer un autre pour permettre à la France dans l’Europe et à l’Europe dans le monde de proposer un autre point d’équilibre, dégagé de la rivalité entre les États-Unis et la Chine ? L’année 2022 sera-t-elle un jalon dans l’histoire stratégique de la France ou la réactivation de ses actions antérieures ?

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Nouvelle-Calédonie : et maintenant ?

Le dernier référendum a logiquement – et légitimement – décidé du maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la nation française. Il reste pourtant encore un destin à construire, tant le Caillou reste divisé : ces divisions ressemblent à bien d’autres, y compris en métropole. Au-delà, c’est une stratégie Pacifique de la France qu’il faut bâtir.

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Lorgnette : coexistence durable

L’expérience des peuples forge ce capital social qui leur permet d’être gouvernés. L’Amérique vient de la conquête de l’Ouest et de la prospérité, la Chine du Tianxia idéalisé et de l’harmonie prescrite, l’Europe du bannissement de luttes intestines après des tragédies dévastatrices. Il en résulte trois trajectoires stratégiques aujourd’hui non convergentes, même si un modèle essentiel de gouvernance occidentale s’affiche comme universel. Le modèle asiatique est dès lors vu comme alternatif et donc antagoniste. Mais ce que l’humanité gagnerait à s’unifier politiquement la priverait du pluralisme dont la richesse nait de la diversité acceptée.

Voici une leçon du dernier ouvrage de Jean Marie Guéhenno, « Le premier XXIe siècle » (ici) que LV vous recommande. Sa démarche tâtonnante mais rigoureuse dénonce le triomphalisme écervelé d’un Occident démocratique aujourd’hui en profonde crise identitaire qui s’aveugle d’une obsession chinoise et veut unifier le monde. Tout comme la Chine voulut prendre le meilleur de l’Occident pour garder le meilleur de la Chine, l’Occident ne doit-il pas prendre le meilleur de la Chine pour sauver le meilleur de l’Occident qui est le pluralisme assumé ? À explorer et méditer.

JOCV

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La France et le plein exercice stratégique : aide-mémoire au roi 2022 (LV 182)

Pour clore cette année et nourrir le débat stratégique de la présidentielle, voici présentées les quatre logiques qui structurent la posture stratégique de la France fin 2021 : les voisinages, les compétitions, les frictions et les guerres froides. Dans le monde post Covid qui s’entrouvre faut-il garder ce logiciel dépassé du XXe siècle? Peut-on en explorer un autre pour permettre à la France dans l’Europe et à l’Europe dans le monde de proposer un autre point d’équilibre, dégagé de la rivalité entre les États-Unis et la Chine? L’année 2022 sera-t-elle un jalon dans l’histoire stratégique de la France ou la réactivation de ses actions antérieures ?

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Nouvelle-Calédonie : et maintenant ? (LV 182)

Le dernier référendum a logiquement – et légitimement – décidé du maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la nation française. Il reste pourtant encore un destin à construire, tant le Caillou reste divisé : ces divisions ressemblent à bien d’autres, y compris en métropole. Au-delà, c’est une stratégie Pacifique de la France qu’il faut bâtir.

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Et maintenant ? (Le Cadet n°86)

« Il n’y a pas d’orgueil à être Français, écrivait Georges Bernanos en 1939, mais beaucoup de peine et de travail, un grand labeur. » Un très grand, effectivement, quand on relève que la presse, les médias et les sites se demandent depuis plusieurs semaines pourquoi le gouvernement français passe en force sur un dossier pourtant tranché il y a trente-trois ans, lorsque les Français ont approuvé par référendum le principe de l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie.

Qu’est-ce qui a changé entretemps, qui mérite qu’on reparte pour un tour dans une crise d’un autre siècle, à part un nouveau mot à la mode, celui d’Indo-Pacifique ? Il serait désormais d’une importance vitale de conserver une facilité navale dans la région. Mais de quelle région parle-t-on ? Le Cadet n’y est allé qu’une fois et à l’escale de Hong Kong il lui a fallu encore douze heures de vol, soit autant que pour venir de France, ce qui veut dire que Nouméa est aussi voisine de Shanghai que l’est Paris, ou que Paris l’est de San Francisco. Les Australiens eux-mêmes ont fini par comprendre que leur île-continent ne pouvait servir de base arrière, et qu’il leur faudrait projeter leurs sous-marins dans le détroit de Taïwan de manière permanente. Et nous, nous sommes encore 600 milles nautiques plus loin.

Il faudrait que nos géostratégistes de gare jouent au Risk sur un globe terrestre et pas une projection de Mercator. Et comprennent que ce n’est pas avant vingt ans qu’on verra des porte-avions chinois patrouiller en mer de Corail – pour obtenir quoi, d’ailleurs, vu que la Chine achète déjà 90 % du nickel calédonien ? –, soit le temps que les ingénieurs chinois apprennent, autrement qu’en lisant Buck Danny, le management de ces navires, l’ergonomie entre le hangar et le pont, que leurs pilotes s’entrainent aux appontages avec autre chose que des copies d’avions russes qui ne donnent pas satisfaction et que leur industrie conçoive des réacteurs fiables et puissants (la motorisation est la grande faiblesse de l’aviation chinoise, militaire et civile). A ce moment-là, que mettra en face notre Marine, elle qui aura tout juste assez de frégates pour sécuriser la Méditerranée et va devoir partager ses Rafales M avec une Armée de l’Air devenue exsangue parce que nos clients du Golfe passent devant elle ?

Et maintenant qu’allons-nous faire, tandis que les tensions sur le Caillou vont de nouveau s’exacerber et qu’une indépendance inéluctable – dont le principe est acquis depuis 1988 – et mal négociée profitera in fine à nos « alliés et amis » de l’AUKUS, qui feront de la Kanaky leur condominium comme durant la Seconde guerre mondiale ? Nous allons avoir de plus l’ONU sur les bras, le territoire est sur sa liste des dix-sept encore à « décoloniser ».

Arbitrage inepte pour un gain stratégique inexistant. « Il y a quelque part dans le monde, poursuivait Bernanos, un jeune Français qui se demande : Mon pays vaut-il la peine d’être sauvé ? A quoi bon ? ». C’est vrai qu’il y a parfois de quoi baisser les bras.

Le Cadet