La Vigie n° 155 (GRATUIT) : Après Hong-Kong, Taïwan ? | La nouvelle doctrine Macron | Lorgnette : Soudan russe

Lettre de La Vigie n° 155 du 25 novembre 2020

Après Hong-Kong, Taïwan ?

Après l’abrogation anticipée de la Loi Fondamentale à Hong Kong et la promulgation de la Loi sur la Sécurité Nationale, le 1er juillet 2020, Pékin a affaibli sa crédibilité internationale tout en adressant un signal clair sur la manière retenue afin de régler des différends à caractère international, considérés par le Parti Communiste comme des affaires intérieures chinoises. Dans un contexte stratégique instable, où les relations entre la Chine et les États-Unis ne manqueront pas de connaitre des tensions, la normalisation du statut de Taïwan est une question à laquelle les meilleures chancelleries doivent se préparer de manière concertée, au risque de se retrouver à nouveau dépourvues.

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La nouvelle doctrine Macron

Le récent entretien donné par le Président de la République sur la politique étrangère constitue une “doctrine Macron”. Le diagnostic est clair et témoigne d’une belle évolution. La dénonciation d’un consensus de Washington est lucide, l’appel à l’autonomie stratégique européenne est précisé, la désignation d’un axe euro-africain marque une priorité . Il reste que ce discours brillant manque peut-être de pédagogie avec nos voisins et partenaires et masque difficilement les limites de la mise en œuvre de cette ambition.

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Lorgnette : Soudan russe

La Russie semble partout. On la voit en Syrie, dans le Caucase, en Libye, en Égypte (LV 99) pour n’évoquer que des pourtours méditerranéens. Voici qu’elle vient de signer un accord pour établir une base navale au Soudan. Cela témoigne d’une « grande stratégie » qui articule plusieurs éléments : d’abord, le retour en Afrique que l’on constate depuis de longues années, avec des actions en RCA et des liens plus solides avec diverses puissances du continent. Ensuite, une ouverture obstinée vers des « mers chaudes », en l’espèce l’océan Indien. Quand Chine et Japon ont établi des bases à Djibouti, Moscou s’installe un peu plus au sud, permettant ainsi un relais vers l’Afrique de l’Est et l’Indo-Pacifique. Notons enfin la consolidation d’une puissance maritime renaissante, densifiée encore par l’ouverture du passage du nord.

Du point de vue soudanais, alors que le régime transitoire a vu le départ d’Omar el Béchir (voir billet et LV 123), l’ouverture du jeu est manifeste : il s’agit de trouver des relais hors des parrains américains et séoudiens (même si Khartoum s’est rapproché d’Israël). Mais aussi de peser face à des voisins problématiques (Soudan du sud, Égypte, voire Éthiopie et Tchad).

JOCV

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Crédit photo : Le grand continent

La Vigie n° 154 : Élections tumultueuses | Conflits (dé)gelés | Lorgnette : Laïcité mal-comprise

Lettre de La Vigie n° 154 du 11 novembre 2020

Élections tumultueuses

L’élection présidentielle américaine a tenu en haleine les médias du monde entier. Beaucoup à cette occasion ont décrié la démocratie américaine. Pourtant, d’autres élections récentes (Biélorussie, Côte d’Ivoire) ont montré des processus guère convaincants. A y regarder de près, l’élection américaine témoigne d’une belle vitalité démocratique, même si politiquement (mais c’est une autre affaire) la crise de transition risque de perdurer.

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Conflits (dé)gelés)

Les conflits gelés étaient un héritage importun de la Guerre froide. Néanmoins, ils se réchauffent dangereusement, les uns après les autres et le cas du Haut-Karabakh alimente la réflexion stratégique autour d’hypothèses de conflits symétriques de haute intensité.

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Lorgnette : Laïcité mal-comprise

Force est de constater qu’à la suite des attentats islamistes des dernières semaines, la laïcité a été beaucoup évoquée, rarement comprise. Tout d’abord en France où certains, qui s’en prévalent, ne la comprennent que comme une sorte d’athéisme d’État, ce qu’elle n’est pas, évidemment. Mais surtout, la notion semble à certains le symbole d’un « universalisme français » : force est de constater que cet universalisme est bien hexagonal et très mal compris à l’extérieur.

C’est vrai chez nos amis européens et américains. Il n’y a qu’à voir le traitement journalistique de « grands » médias américains, il est vrai fortement influencés par l’idéologie postcoloniale, woke et communautariste. Même Le Monde sous-entend que c’est excessif (ici). Mais ce fameux « modèle français » n’est pas plus compris des pays musulmans et la réaction française a été vue (et instrumentalisée par certains, notamment R. Erdogan) comme une persécution officielle des musulmans. Rappelons que les Français musulmans sont ceux d’Europe qui se sentent les mieux intégrés à leur pays. Et déplorons que notre laïcité soit si mal assimilée, d’abord par nous, incapables de l’expliquer simplement.

OCV

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Elections tumultueuses (LV 154)

L’élection présidentielle américaine a tenu en haleine les médias du monde entier. Beaucoup à cette occasion ont décrié la démocratie américaine. Pourtant, d’autres élections récentes (Biélorussie, Côte d’Ivoire) ont montré des processus guère convaincants. A y regarder de près, l’élection américaine témoigne d’une belle vitalité démocratique, même si politiquement (mais c’est une autre affaire) la crise de transition risque de perdurer.

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Les bases opérationnelles avancées temporaires françaises au Sahel (L. Guignon)

Nous avons le plaisir le travail d’une étudiante de M1 de l’IEP de Lille, Léa Guignon, sur les bases opérationnelles au Sahel. Le sujet est technique mais son inscription dans la durée longue suscite l’intérêt. Surtout, cette publication répond à l’ambition de La Vigie, celle de donner leur chances aux jeunes plumes… Merci à elle.LV

Les bases opérationnelles avancées temporaires françaises au Sahel

Lancée le 1er août 2014 l’opération Barkhane s’étend à la Mauritanie, au Niger, au Mali, au Burkina Faso et au Tchad. Les objectifs de l’opération sont les suivants : appuyer les forces armées locales de la bande Sahélo-saharienne (BSS) dans leurs actions de lutte contre les groupes armés terroristes (GAT), éviter la résurgence des groupes et l’apparition de nouveaux sanctuaires et appuyer les forces internationales qui œuvrent en faveur de la population[1]. La France développe une logique de mobilité, de flexibilité, et de réactivité des forces afin de surprendre l’ennemi dans toute la BSS[2]. Pour cela Barkhane s’appuie sur un réseau de bases militaires permettant de quadriller la zone.

On distingue plusieurs catégories de bases militaires au sein du dispositif Barkhane. Il existe des bases opérationnelles « permanentes » (BOAP) comme celles de Gao, Niamey et N’Djamena. Ce sont les bases les plus importantes de l’opération en termes de commandement et de volume. Leurs systèmes de défense sont performants, elles sont bien fournies en moyens de communication et en équipements militaires. Les bases opérationnelles avancées « temporaires » (BOAT), sont celles de Tombouctou, Kidal, Tessalit, Menaka, Gossi, Faya-Largeau, Abéché et Aguedal. Ce sont des points d’appui complémentaires aux bases permanentes. Elles n’ont de temporaire que le nom puisque certaines existent depuis les prémices de l’opération Serval. Ce sont des emprises plus petites que les bases permanentes, leur aménagement est rustique au départ mais elles peuvent devenir plus confortables avec le temps[3]. Bien que la sédentarisation apparaisse essentielle dans une guerre de contre-insurrection, celle-ci fait face à plusieurs limites. Quels sont les impacts géostratégiques que les BOAT peuvent présenter dans la conduite de Barkhane ? Quel avenir ont-elles au sein des futures opérations ?

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Plus que le Dialogue national, ce sont les erreurs du Gouvernement qui rendent indispensable la relecture de l’Accord d’Alger (M. Mara)

Alors que la situation au Mali devient politiquement délétère, il nous semble utile de donner un peu de hauteur de vue. C’est pourquoi nous sommes honorés de publier ce texte de M. Moussa Mara, ancien Premier ministre du Mali. LV.

L’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, signé à Bamako en 2015, accuse de nombreux retards dans sa mise en œuvre. Cinq ans après sa signature, la plupart de nos compatriotes et de nos partenaires montrent une grande lassitude devant la situation qui n’évolue que peu. En outre, les Maliens rejettent dans leur majorité un document qu’ils sont pourtant très peu à connaitre. Ils ont fini par réclamer la relecture de ce document lors du Dialogue national inclusif. Mais plus que cet évènement, ce sont les erreurs des autorités maliennes qui ont conduit le pays dans cette situation pour finalement rendre la révision du document indispensable. Sans cela, aucune réforme institutionnelle n’est envisageable.

Les erreurs de nos autorités, commises ces cinq dernières années et qui sont de plusieurs ordres doivent être mises en exergue afin de les prendre en compte dans la phase qui pourrait s’ouvrir après la relecture de l’Accord.

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La Vigie n°144 : Tirer son épingle du jeu | Disparue : autorité scientifique | Trocs au Sahara

Lettre de La Vigie n° 144 du 10 juin 2020

Tirer son épingle du jeu

Pour que la France tire son épingle du jeu de la crise actuelle alors que le choc sanitaire s’atténue, le stratégiste lui recommande d’impulser un nouvel élan stratégique réaliste et d’envisager un renouveau ambitieux de son paradigme national. Ces deux axes sont les clés d’un projet à long terme.

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Disparue : autorité scientifique

La pandémie n’est pas un tournant géopolitique mais elle accélère des tendances de fond. Parmi celles-ci, l’affaissement des autorités se poursuit. L’autorité scientifique était une des dernières qui subsistait. Or, l’influence des savants a beaucoup perdu dans la crise, que ce soit dans l’analyse du virus ou à l’occasion des grands débats sur les différentes natures de traitement de la maladie. Cela ne signifie pas la fin des progrès scientifiques, loin de là. Mais l’autorité publique de la parole des savants, grâce à leur légitimité et leur neutralité, a pâti des intérêts qu’ils pouvaient défendre. Cela affaiblit un peu plus la cohésion des sociétés.

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Lorgnette : Trocs au Sahara

La mort d’Abdelmalek Droukdal, un chef islamiste d’AQMI au Mali, n’est peut-être qu’un succès tactique. Peut-être est-il aussi le signe d’un mouvement plus large. En effet, les choses bougent au Mali comme en Algérie. Au Mali, les dernières élections législatives n’ont apparemment pas changé les équilibres politiques.  Cependant, IBK, le président malien, a compris qu’il fallait bouger et pour cela négocier aussi bien avec les Touaregs que les Peuls.

En Algérie, le nouveau président Tebboune a contrôlé le hirak. Il a lancé une modification de la Constitution qui permet à l’Algérie d’engager l’armée au-delà des frontières. Cela ne concerne pas le Maroc mais plutôt les frontières à l’Est, car la situation en Libye évolue en faveur des protégés de la Turquie, ce qui inquiète Alger.

Il fallait donc garantir le sud. A Droukdal était non seulement islamiste mais algérien et il voulait empêcher les subtils trocs au sud. Aussi peut-on imaginer qu’Alger l’a lâché, de façon à stabiliser le Sahara et avoir les mains libres. Il reste qu’IBK, le président malien, a trop tardé et que de grandes manifestations réclament sa démission. Pas idéal pour négocier, suffisant peut-être pour enfin se décider à bouger.

JOCV

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Crédit photo : Eric Constantineau - www.ericconstantineau.com on Visualhunt.com / CC BY-NC

Double profondeur stratégique au Sahel (M. Goumiri)

Dans le cadre de nos débats du Cercle euromaghrébin (ici), nous sommes heureux de publier cette contribution du Dr Goumiri. Merci à lui. LV

Source

Le concept de la profondeur stratégique est un outil opératoire de la géopolitique qui permet de comprendre les décisions et les conflits qu’imposent les grandes puissances sur la scène internationale. Il est construit sur des considérations historiques, de défense et de sécurité, économiques et culturelles et des visions à moyen et long terme.

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La Vigie n° 137 : Persistance de Boko Haram | PANG, manœuvre océanique, | Lorgnette, Conférence de Munich 2020

Lettre de La Vigie du 4 mars 2020

Persistance de Boko Haram

La (faible) attention française pour l’Afrique est concentrée sur la bande sahélo-saharienne à cause de l’opération Barkhane. Pourtant, une autre insurrection djihadiste persiste autour du lac Tchad : Boko Haram perdure en effet et a profondément muté. Face à cela, les pays de la zone ont pris des initiatives vigoureuses depuis cinq ans qui ont permis de cantonner le foyer de crise. Et si on regardait cet exemple plutôt que de s’obstiner dans une stratégie sahélienne dont on ne voit pas les fins ?

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PANG : Manœuvre océanique

Le projet de Porte-avions de nouvelle génération esquissé par le ministère des armées pour remplacer le Charles de Gaulle en 2038 n’est encore qu’un dossier industriel et technologique. Il va être bientôt précisé. Mais il reste à lui donner une vraie dimension stratégique comme pivot militaire d’une capacité de manœuvre et d’action océanique globale à l’horizon 2060 apte à protéger les intérêts de la France dans le monde d’alors.

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Lorgnette : Conférence de Munich 2020

La dernière conférence sur la sécurité de Munich avait pour thème l’Affaiblissement de l’Occident ou Westlessness (14-16 fév.). Elle a confirmé l’anomie occidentale.

Après l’entretien à The Economist (relation transatlantique, LV 129) et le discours de l’École Militaire (dissuasion, LV 136), elle a permis de compléter la vision stratégique du PR d’un monde instable qui se transforme dangereusement. Il avait réaffirmé le besoin d’une stratégie et d’une souveraineté européennes élargies dépassant les questions militaires pour notamment englober normes, technologie, infrastructure, communications, IA ou voisinages. Il a constaté l’éloignement américain, le refus allemand de la puissance, les divergences entre Européens alors que l’UE est invisible dans la gestion des crises qui engagent sa sécurité et affectent ses valeurs. Parmi les enjeux débattus à Munich, la Syrie ne figurait pas à l’agenda alors que la crise humanitaire cristallise différence de priorités et compétition entre puissances, recours à l’économie ou aux migrants comme armes politiques. Espérons que la réunion d’urgence des ministres des AE de l’UE sera l’occasion d’un réveil salutaire.

JOCV

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Persistance de Boko Haram (LV 137)

La (faible) attention française pour l’Afrique est concentrée sur la bande sahélo-saharienne à cause de l’opération Barkhane. Pourtant, une autre insurrection djihadiste persiste autour du lac Tchad : Boko Haram perdure en effet et a profondément muté. Face à cela, les pays de la zone ont pris des initiatives vigoureuses depuis cinq ans qui ont permis de cantonner le foyer de crise. Et si on regardait cet exemple plutôt que de s’obstiner dans une stratégie sahélienne dont on ne voit pas les fins ?

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Sahelistan, poil aux dents (Le Cadet n° 67)

Les articles se multiplient, en France mais surtout à l’étranger, unanimes quant à l’échec annoncé de Barkhane – car il est inutile de se bercer de périphrases.

Source

Le sommet de Pau n’aura rien apporté, et la conférence de presse n’aura été qu’un déroulé de formules creuses. Ce ne sont pas 220 soldats français de plus ni même les drones Reaper qui vont nous faire gagner la guerre dans cette zone immense où la France n’a jamais été que tolérée par des peuples plus ou moins nomades qui n’avaient pas désarmé même du temps de la colonisation (relire Terre des hommes de Saint-Exupéry). C’est notamment ce que rappelle un essai paru récemment [1] : nous ne sommes au Sahel que les instruments d’un jeu africain sur lequel nous pensons encore peser, cultivant une nostalgie coloniale assez déplacée, finalement fiers de ce mot de Françafrique qui nous donne le rôle du vilain mais nous fait croire encore à un statut de moyenne puissance, et nous essayant comme les Américains au nation building.

Guerre contre le terrorisme, guerre préemptive, bataille de l’avant : voilà qu’on nous ressort la panoplie de Bush-le-petit, comme si les batailles perdues et les guerres ratées depuis 2001 n’avaient servi à rien. Sommet du vocabulaire d’importation, le concept de « Sahelistan », un mot (pour citer Robespierre, dans un tout autre contexte), inventé par des fripons pour faire peur aux imbéciles. Il est censé désigner un gigantesque no-man’s-land, sans ressource immédiatement négociable comme le pétrole, sans eau, sans infrastructure, sans débouché par la mer si ce n’est la Libye, mais dont la constitution serait un danger mortel pour l’Europe, à l’image de l’État islamique en Syrie et en Irak.

Sauf que ces pays présentent à l’inverse des facilités dans tous les domaines ci-dessus rappelés. Et surtout qu’ils n’ont pas constitué un front avancé dans la lutte contre les djihadistes – que la très fine manœuvre de Trump contre la Perse nous force désormais à récupérer – puisque ceux-ci sont nos propres gamins endoctrinés religieusement dans nos mosquées, partis pour d’emblée revenir, la grâce divine ne leur étant pas tombée dessus sur le chemin de Damas mais dans les rues de Seine Saint-Denis comme le rappellent deux autres ouvrages parus ce mois-ci [2].

Les Américains et les Européens l’ont bien compris qui nous laissent nous débrouiller au Sahel, puisque le risque que les Peuls, Dogons ou Touaregs provoquent des troubles en France est le même que celui de voir les Talibans faire des attentats sur les Grands boulevards : à peu près égal à zéro. Et si question religieuse il y a à régler, ce n’est pas au « Sahelistan », c’est à domicile.

Le Cadet

[1]           Marc-Antoine Pérouse de Montclos, Une guerre perdue. La France au Sahel. J.C. Lattès, 2020.

[2]           Bernard Rougier (dir.), Les territoires conquis de l’Islamisme, PUF, 2020.

            Hugo Micheron, Le jihadisme français : Quartiers, Syrie, prisons, Gallimard, 2020.