Pourquoi a-t-on besoin de redynamiser le dialogue Euro-Africain ? (Moussa Mara)

Moussa Mara, ancien premier ministre du Mali, nous fait le grand honneur de nous envoyer ce texte écrit à l’occasion du sommet Europe Afrique d’Abidjan (29 et 30 novembre). Nous le remercions chaleureusement. JDOK.

L’Afrique de la Guerre froide a suivi celle de la colonisation avec le maintien des positions stratégiques des anciennes puissances tutélaires. Elle devint ainsi une zone d’influence, un pré-carré, une chasse gardée, un terrain de jeu des puissances où des conflits se déroulaient par procuration. La bipolarisation du monde a figé les grands enjeux géostratégiques. Ensuite, le vent des ouvertures démocratiques suite à la chute de l’Union Soviétique, la construction européenne et l’ouverture à l’Est sous l’égide de la réunification allemande, portèrent le désintérêt stratégique de l’Europe vis-à-vis de l’Afrique jusqu’au milieu des années 2000.

Et puis, peu à peu, avec d’une part les investissements faramineux de la Chine – cette dernière venue en Afrique en vue de chercher des débouchés pour ses produits et faire du commerce- et, d’autre part, la croissance économique africaine entrée dans un cycle continu sous l’effet de politiques publiques favorables et de dynamiques internes porteuses (démographie, urbanisation, cours des matières premières, diversification économique soutenue par un essor des TIC), l’Afrique « terre d’opportunités économiques » remplace l’Afrique « terre des désastres et de la commisération ». Le continent africain s’impose maintenant comme celui des opportunités. De quoi motiver l’Europe à engager avec lui un dialogue fécond et un partenariat mutuellement avantageux. Continue reading « Pourquoi a-t-on besoin de redynamiser le dialogue Euro-Africain ? (Moussa Mara) »

Pourquoi le processus de paix est-il bloqué au Mali ?

A la suite de notre numéro 80 qui évoquait le Mali, nous avons reçu d’un acteur du terrain ce billet dont les précisions nous ont paru utiles pour éclairer la complexité du septentrion malien. JDOK.

Source

Au Mali, des acteurs issus de groupes terroristes armés (GAT) sont devenus les principaux leaders du processus de paix.  Continue reading « Pourquoi le processus de paix est-il bloqué au Mali ? »

N° 80 du 25 octobre 2017 : Europe, régions et unité | L’épreuve malienne | Le CINC chinois

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Extrait des articles présents dans cette lettre :

Europe, région et unité

C’est peu dire que l’affaire catalane nous révèle une avalanche de non-dits et de contradictions : au-delà du cas espagnol, elle renvoie au rapport entre l’Union et les Nations et, plus généralement, au lien entre légalité et souveraineté. La Catalogne ou l’égoïsme des riches La revendication catalane doit s’apprécier pour ce qu’elle est : la volonté de riches de s’isoler de leur communauté d’origine afin de bénéficier de l’entre-soi. On peut certes y ajouter l’histoire et l’identité, ce qui rend d’ailleurs le dossier malaisé et reste source d’ambiguïté. Mais ne nous leurrons pas : il s’agit d’un égoïsme de privilégiés qui ne veulent plus payer pour la solidarité collective. Ils le proclament d’ailleurs ouvertement : « nous produisons 20 % du PIB espagnol, pourquoi paierons-nous pour le reste du pays ? ». Ce point soulève une des racines essentielles de la cohésion nationale, celle de la solidarité territoriale.  […]

L’épreuve malienne

Après le dégel de l’ordre bipolaire de la guerre froide, un certain nombre d’États furent soumis à de fortes contraintes internes qui les ont fragilisés voire même menacés dans leur existence (dissidences, luttes internes, conflits ethno-religieux, mafias et criminalité larvée). Mais la faillite de certains d’entre eux altérait l’ordre établi de Yalta voire celui de Westphalie. Les forces armées françaises furent donc engagées à l’extérieur, dans des situations d’urgence et en soutien de ces États en danger. Après les missions en ex-Yougoslavie et au Ruanda des années 1990, il y eut les expéditions d’Afghanistan des années 2000, et ensuite celles de Libye, Côte d’Ivoire, Mali et RCA. Sans oublier la lutte maritime incessante contre les pirates et les narcos. Il s’agissait de préserver un certain état d’organisation du monde fondé sur les États, pions de base de la société internationale, acteurs de la mondialisation heureuse. Dans le cadre juridique du Conseil de sécurité des Nations Unies, l’action militaire était menée au sein de coalitions soutenues plus ou moins directement par l’ONU, l’OTAN ou l’UE. Ces actions militaires contrastaient avec les missions antérieures de soutien à la paix conduites selon l’Agenda pour la paix de l’ONU ou le cadre de Petersberg de l’UE. Ce furent des missions de combat de haute intensité dans un collectif euro-atlantique. Ce ne fut pourtant pas le cas au Mali. Et l’opération Serval déclenchée début 2013 trouva la France bien seule en première ligne. Barkhane qui lui a succédé et la force du G5 Sahel qui pourrait l’épauler ou s’y substituer restent tout aussi solitaires. Constatons qu’il y a pour la France une forte exposition stratégique dans un Mali dont la situation sécuritaire et politique lui échappe. […]

Lorgnette :   Le CINC chinois

JDOK

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La Côte d’Ivoire : exemple de sortie de crise ? (M. Cuttier)

La Côte d’Ivoire est sortie des radars de l’actualité française. Pourtant, la crise y fut très longtemps présente dans les préoccupations françaises, tout au long des années 2000. Depuis, on s’en désintéresse : signe d’une sortie de crise réussie ou zone grise mise à l’écart tant qu’elle ne fait pas de bruit ? Martine Cuttier, docteur en histoire et enseignante en master à l’université de Toulouse 3, nous en dit plus : merci à elle. JDOK

Membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, détentrice du droit de veto, la France continue à s’occuper des affaires du monde en proposant des options de sortie de crise. Elle reste active dans sa zone traditionnelle d’influence sub-saharienne, où elle intervient en premier une fois obtenue la caution de la communauté internationale par une résolution du Conseil et constitué ensuite une coalition.

Dans le cas de la Côte d’Ivoire qui a traversé une décennie de crise politique, quelle méthode de sortie de crise fut proposée, comment fut elle appliquée et quelles en sont les limites ?

 Source

Cette contribution s’appuie sur une communication récente du général de corps d’armée (2S) Bruno Clément-Bollée pour la revue Res Militaris[1] dans laquelle il propose une démarche de sortie de crise, fruit d’expériences empiriquement menées au gré de sa carrière en Afrique. Elle n’est pas une doctrine officielle.

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La République de Centrafrique peut-elle se passer de la France (et inversement) ? (C. Glock)

La Vigie est heureuse d’ouvrir ses colloques à de jeunes plumes. Cynthia Glock nous propose ici de faire le point sur la Centrafrique et ses relations avec la France. Merci à elle. JDOK.

Le 31 octobre 2016, le ministre de la Défense français Jean-Yves Le Drian annonçait la fin de l’opération militaire Sangaris en Centrafrique. Après trois ans d’intervention et malgré un début de stabilisation, la situation sécuritaire de cet Etat failli, plongé dans une crise économique chronique sur fond de tensions ethnico-religieuses, ne s’est pourtant pas franchement améliorée…

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 Source

Début décembre 2013, alors que la République de Centrafrique (RCA) est à l’aube de sa troisième guerre civile en moins de dix ans (2004-2007, 2012-2013 puis 2013-2014) [1], la France alerte ses partenaires des Nations-Unies – jusqu’ici peu concernés – sur l’urgence de la situation. Alors qu’elle-même déploie déjà près de 4000 militaires au Mali dans le cadre de l’opération Serval, la France fait voter la résolution 2127 le 5 décembre 2013, qui permet la mise en place de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique[2] (Misca) et son appui par le lancement de l’opération française Sangaris.

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N°64 : Défense en campagne | Après l’EI

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Extrait des articles présents dans cette lettre :

Défense en campagne

Ledébat présidentiel 2017 est préempté depuis près de deux mois par des priorités médiatico-judiciaires sur lesquelles il y aurait à dire si La Vigie avait vocation à aborder les questions politiques sensibles. Le résultat de cette situation inédite est que les questions de fond qui nous concernent sont éclipsées : quelle sécurité pour les Français, quelle Défense pour la France, quelles relations avec nos voisins, quelle politique extérieure et quelle participation de la France à l’ordre et à la paix internationale ? La Défense est comme toujours le parent pauvre de la présidentielle tant il est admis qu’elle fait consensus et n’est pas clivante. On entend même en cette fin de législature que c’est le secteur le plus épargné par les critiques, voire que ce ministre de la Défense est le plus performant de la Vè République ! Alors, de dépit face à ce débat avorté, nous tenterons de remplir le vide en répondant à deux questions : d’abord, à quoi sert une plateforme présidentielle de défense (ce numéro) ; puis quelles sont les briques d’un programme de défense pour la France aujourd’hui ? (les prochains, LV 65 et 66).  […].

Après la chute de l’EI

L’État Islamique (EI) recule partout. Il a été chassé de Syrte en Libye, a disparu d’Alep et de la Syrie occidentale, a perdu son contrôle de la Syrie du nord et notamment le chef-lieu d’Al-Bab mais aussi Palmyre, tandis que les Kurdes, appuyés par les Américains, progressent vers le sud en direction de Raqqa, la capitale de l’émirat. En Irak, il a perdu ses positions au centre et chacun observe la bataille de Mossoul qui voit, inexorablement, les forces « irakiennes » appuyées par la coalition progresser désormais sur la rive droite du Tigre. Au Nigéria, Boko Haram voit sa zone de contrôle également réduite. Autrement dit, la partie est perdue pour l’EI qui a également égaré la magie médiatique qui avait été l’autre composante de son succès. On sait en effet que le flux des combattants s’est drastiquement tari, ne serait-ce que parce qu’il n’y a plus de voie d’accès. L’EI est assiégé et est voué à disparaître. Il faut dès lors penser la suite, selon trois directions : l’avenir de la région, la question des hommes (revenants et réfugiés), enfin la pérennité de son idéologie. […].

Lorgnette : Djihad et Sahel

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Source image : Jordi Bernabeu via Visual Hunt / CC BY

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Le monde se fragmente : que faire ? (M. le PM Moussa Mara)

Nous sommes heureux d’accueillir ce texte de M. Moussa Mara, ancien Premier Ministre du Mali. Il témoigne d’une vision certaine et d’un intérêt évident pour l’analyse stratégique. JDOK

Tout observateur de la vie internationale remarquera que l’évolution de notre planète présente de réels signes d’inquiétudes. Dans de nombreux pays importants, on voit progresser le sentiment du repli sur soi, le populisme triomphant et la promotion des idées radicales et de confrontations. On est également témoin de l’essor des mouvements intégristes, partisans de la confrontation des idéologies et des civilisations. Les positions dominantes semblent orientées sur le repli sur soi voir le chacun pour soi. Ici ou là, on voit les frontières se fermer alors que jamais, notamment grâce aux technologies, le monde n’a été aussi intégré, l’information et les savoirs aussi partagés !

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Micmacs au pays du cacao: 2 mauvaises raisons de ne pas s’inquiéter et 1 bonne de s’alarmer

La Côte d’Ivoire a récemment connu une mutinerie à Bouaké. Près de 15 ans après le début de la guerre civile, cet événement n’est-il qu’un incident dans la normalisation conduite par A. Ouatarra, ou est-ce un signe annonciateur de quelque chose de plus grave  ? J. M. Lavoizard, notre correspondant, nous donne son éclairage. Merci à lui. La Vigie

Mutinerie Bouaké

Source

Issu du néerlandais muyte maken qui signifie faire une émeute, micmac décrit bien la situation politico-militaire actuelle en Côte d’Ivoire.

Ceux qui s’inquiètent de possibles conséquences économiques négatives des mutineries suspendues au règlement sonnant et trébuchant des engagements de la politique du chéquier peuvent se rassurer à bon compte, rien ne changera à court terme au plan économique. Pour les deux raisons suivantes : Continue reading « Micmacs au pays du cacao: 2 mauvaises raisons de ne pas s’inquiéter et 1 bonne de s’alarmer »

Étude stratégique n° 5 (gratuit): La régionalisation de la sécurité en Afrique, le cas du Sahel

J. Dufourcq vient de publier dans le dernier hors série de Res militaris un article sur La régionalisation de la sécurité en Afrique, l’exemple du Sahel. Res Militaris est une revue en ligne de sciences sociales consacrée aux questions militaires et de sécurité. Ce HS, paru en décembre 2016, est dirigé par Martine Cuttier, de la faculté de Toulouse, est intitulé :  « France : opérations récentes, enjeux futurs« . Vous pouvez le lire gratuitement ici.

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Source

Résumé

Les questions de sécurité en Afrique ont, comme partout, des racines socio-économiques et ethno-politiques. La géographie les a compliquées dans la zone de transition sahélienne entre Afrique blanche méditerranéenne et Afrique noire subsaharienne. Les pays riverains du Sahel qui ont hérité de l’histoire des comportements économiques et des réflexes sécuritaires de coopération-compétition sont aujourd’hui soumis à un faisceau de menaces qu’ils ont bien du mal à traiter collectivement. Longtemps ingouverné, le Sahel s’est en fait constitué en terrain de chasse libre depuis une vingtaine d’années et est soumis aujourd’hui à des tensions multiples. Il pourrait aussi devenir une sorte de laboratoire d’une coopération vertueuse de la dizaine de pays que leur périphérie saharienne préoccupe. Pour la France qui y entretient un réseau de bases et y conduit des opérations militaires souvent à son corps défendant, faire en permanence la pesée des risques africains et agir sans relâche pour le développement sécurisé et durable du Sahel sont deux obligations de sécurité nationale.

Introduction                                                                                                      p. 2

I . Contrastes africains                                                                                  p. 2

II . Problématique sécuritaire de la frontière en espace complexe : le Sahel p.6

III. Sahel, ravage sud du Sahara, nœud régional                              p. 6

IV. Dix riverains autour d’un même espace : retour théorique   p. 9

V. La sécurité des Etats à façade sahélienne : bilan sécuritaire  p. 10

VI. Sécurité et développement durable du Sahara : propositions p. 11

Pour finir                                                                                                               p. 12

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N° 59 : Stratégie 2017 (1/2) | L’Afrique arc-en-ciel

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Extrait des articles présents dans cette lettre :

Stratégie en 2017 (1/2)

Au seuil de 2017, il est utile de faire le point stratégique : selon l’usage, nous verrons d’ici un an si nos prévisions se confirment. Mais au fond, peu importe : le plus utile dans l’exercice consiste à se projeter, à tenter d’anticiper demain, seul diagnostic nécessaire car préalable à la décision stratégique. Si 2016 fut un tournant stratégique majeur (LV 33 et 58), nul doute que 2017 favorisera des mouvements rendus possibles par l’ouverture du jeu et la fluidité de ce qui n’est plus un « système international ». Ce premier article évoquera le diagnostic géopolitique, la vision stratégique étant développée dans 15 jours. […]

L’Afrique arc-en-ciel

Commencer l’année en regardant où en est l’Afrique, c’est bien évidemment reconnaître son poids dans l’équation stratégique de 2017. Regardons l’Afrique comme l’un des foyers de développement actif de la planète et non comme un pôle de puissance car l’Afrique n’a toujours pas fait son unité géopolitique. On le sait (cf. LV 19), elle est lestée de ses quatre handicaps structurels : l’État-nation comme modèle politique, le libéralisme comme doctrine économique, les guerres inter-ethniques comme legs du passé et un modèle d’Union mal adapté à ses réalités. Elle est confrontée à deux difficiles dilemmes : politique pour asseoir une identité étatique authentiquement africaine, et sécuritaire pour faciliter un développement vraiment durable. […]

Lorgnette : Fin de règne et déni moral

Source image :  Steve Crane via Visual Hunt / CC BY-NC-ND

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